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froid. Qui sait combien de temps vous allez attendre! J'attendrai s'il le faut jusqu'à la mort. Quel mot! Laissez-moi descendre; je vois de la lumière dans le pavillon. Laissez-moi, vous dis-je; j'ai trouvé le moyen. Elle s'élança légèrement hors de la litière et courut à la porte demeurée entr'ouverte, parce que le gardien attendait pour refermer, le retour du carrosse. Elle se glissa comme une belette par l'étroite ouverture. Quelques minutes après, elle accourait vers la litière. Venez, dit-elle, madame; tout est arrangé. Quoi? J'ai parlé au gardien de cette maison. Je lui ai annoncé une dame effrayée par des voleurs, qui voulait reprendre connaissance près du feu, et surtout n'être pas vue. Mais.... Mais, du coin de ce feu, vous verrez sortir ou entrer tout le monde, car la porte touche au pavillon de ce gardien. Allons! dit la marquise qui à son tour pénétra dans la maison, il me verra peut-être, mais moi aussi je le verrai! L'inconnu n'avait pas menti. C'était bien le roi, qui, sorti du Louvre quand chacun le croyait couché, s'était acheminé vers l'hôtel de Zamet. Henri avait le coeur troublé comme un malfaiteur! Son escapade l'embarrassait. Le plus tendre et le plus infidèle des amants, il passait son temps à défaire à coups d'épingle les grands bonheurs de sa vie. Quelque chose de nouveau s'offrait à lui, des yeux noirs après des yeux bleus, un esprit de démon après une âme d'ange, il croyait avoir tout sauvé en n'emportant que son cerveau et en laissant son coeur à la maison. D'ailleurs, se disait-il, c'est une heure, c'est une moitié de nuit, c'est quelque gai refrain entre deux baisers folâtres, et tout s'éteindra avec la flamme des bougies de Zamet. Ce Zamet, quel brave compère! toujours au guet pour distraire son prince. Riche d'imagination plus encore que d'écus, il me rend la royauté amusante. Chacun me croit au lit, dormant; ce Zamet va me faire rire. Demain matin, en me réveillant au Louvre, sous mon dais royal, je croirai avoir fait un charmant rêve.... Et puis après, comme j'aimerai ma douce Gabrielle! C'est dans de telles dispositions que le roi entra par la porte où l'attendait Zamet, qui lui dit à l'oreille: Elle est venue, elle est seule. XII. LE RENDEZ-VOUS 111 La belle Gabrielle, vol. 2 Il y avait fête chez Zamet le Florentin. Les danseurs, choisis et peu nombreux, s'escrimaient dans la grande salle à essayer des danses nouvelles. Quelques joueurs s'étaient attablés en un coin. Le masque couvrait la plupart des visages. Quand le roi fit son entrée, masqué aussi, nul ne bougea et ne sentit la présence du maître. Henri n'était pas un danseur vaillant. Il n'aimait le jeu que pour gagner. Ces deux passe-temps ne lui agréant pas, Henri promena autour de lui des regards découragés. Zamet, qui s'en aperçut, songea bien vite à lui en procurer un troisième. Une femme masquée, enveloppée dans les fines draperies d'un voile oriental, était assise à l'écart, en face du roi, qui admirait déjà les riches contours de sa taille, sa cambrure hardie, la blancheur de ses épaules, sur lesquelles s'attachait un cou d'ivoire. Zamet, en passant dans la salle, fit un signe imperceptible à cette femme, pour lui désigner le roi. Elle se leva, lente et souple. Ses yeux lançaient deux rayons de flamme par les trous du masque. Sa robe, avant de retomber sur ses pieds délicats, laissa voir la cheville d'une jambe de nymphe. Cette femme vint au roi et le regardant en face avec une fixité qui fascinait. Voilà, dit-elle d'une vois assourdie par le bruit des musiques; voilà, si je ne me trompe, un cavalier qui s'ennuie. C'est vrai, répliqua le roi, mais je sens que l'ennui s'éloigne à mesure que vous approchez. Un cavalier, poursuivit l'inconnue avec une légère ironie, qui sans doute est las de la perfection. Hélas! dit Henri, un peu lâchement, existe-t-elle cette perfection dont vous parlez? Ce n'est pas à moi de répondre. Cependant, vous le pourriez, plus que personne. Je n'ai qu'un mérite, c'est de bien vouloir ce que je veux. Si je prends le bras de quelqu'un, je le tiens ferme; si je prends son esprit, je le garde. Mais son coeur? Ne parlons pas de cela. On saisit un bras, on captive un esprit, mais le coeur, où est-ce? Le coeur, dit Henri en abaissant son regard brûlant, doit être sous ces noeuds de rubans brodés d'or que je vois frissonner à votre côté gauche; le satin s'agite: c'est qu'au-dessous bat quelque chose. Appelons cela le coeur. L'inconnue, troublée par cette galante attaque, baissa la tête, et les noeuds de ruban palpitèrent plus fort que jamais. Vous m'avez défié continua le roi. Voici mon bras. Quant à mon esprit, il vous écoute. Je prends donc votre bras, s'écria l'inconnue avec une sorte de triomphe. Cela d'abord. Et, pour causer plus librement, quittons, si vous voulez bien, cette salle pour la galerie des fleurs qui y aboutit. Je crois que j'ai à dire à mon cavalier beaucoup de choses qui l'intéresseront. XII. LE RENDEZ-VOUS 112 [ Pobierz caÅ‚ość w formacie PDF ] |